Avant la disponibilité des ordinateurs, la détermination des valeurs KM et Vmax nécessitait une manipulation algébrique de l’équation de base de Michaelis-Menten. Le Vmax étant approché de manière asymptotique (voir figure 8.11), il est impossible d’obtenir une valeur définitive à partir d’un graphique typique de Michaelis-Menten. Comme KM est la concentration du substrat à Vmax/2, il est également impossible de déterminer une valeur précise de KM. Cependant, le Vmax peut être déterminé avec précision si l’équation de Michaelis-Menten est transformée en une équation qui donne un tracé en ligne droite. En prenant la réciproque des deux côtés de l’équation 23, on obtient
Un tracé de 1/V0 en fonction de 1/, appelé tracé de Lineweaver-Burk ou tracé à double réciproque, donne une ligne droite avec un intercept de 1/Vmax et une pente de KM/Vmax (figure 8.36). L’ordonnée à l’origine sur l’axe des x est -1/KM.
Figure 8.36
Un tracé double-réciproque ou Lineweaver-Burk. Un tracé double-réciproque de la cinétique enzymatique est généré en traçant 1/V0 en fonction 1/. La pente est le KM/Vmax, l’ordonnée à l’origine sur l’axe vertical est 1/Vmax, et l’ordonnée à l’origine sur l’axe horizontal (plus…)
Les tracés double-réciproques sont particulièrement utiles pour distinguer les inhibiteurs compétitifs et non compétitifs. Dans le cas d’une inhibition compétitive, l’intercept sur l’axe des y du tracé de 1/V0 en fonction de 1/ est le même en présence et en l’absence d’inhibiteur, bien que la pente soit augmentée (figure 8.37). Le fait que le point d’intersection reste inchangé s’explique par le fait qu’un inhibiteur compétitif ne modifie pas le Vmax. À une concentration suffisamment élevée, pratiquement tous les sites actifs sont remplis par le substrat, et l’enzyme est pleinement opérationnelle. L’augmentation de la pente de la courbe 1/V0 en fonction de 1/ indique la force de liaison de l’inhibiteur compétitif. En présence d’un inhibiteur compétitif, l’équation 31 est remplacée par
dans laquelle est la concentration en inhibiteur et Ki est la constante de dissociation du complexe enzyme-inhibiteur.
Figure 8.37
Inhibition compétitive illustrée sur un tracé double-réciproque. Un tracé double-réciproque de la cinétique enzymatique en présence ()et en l’absence () d’un inhibiteur compétitif illustre que l’inhibiteur n’a aucun effet sur le Vmax mais augmente le KM.
En d’autres termes, la pente du tracé est augmentée par le facteur (1 + /Ki) en présence d’un inhibiteur compétitif. Considérons une enzyme dont le KM est de 10-4 M. En l’absence d’inhibiteur, V0 = Vmax/2 lorsque = 10-4 M. En présence d’un inhibiteur compétitif de 2 × 10-3 M qui est lié à l’enzyme avec un Ki de 10-3 M, le KM apparent (KappM ) sera égal à KM × (1 + /Ki), soit 3 × 10-4 M. La substitution de ces valeurs dans l’équation 23 donne V0 = Vmax/4, quand = 10-4 M. La présence de l’inhibiteur compétitif réduit donc de moitié la vitesse de réaction à cette concentration de substrat.
Dans l’inhibition non compétitive (figure 8.38), l’inhibiteur peut se combiner soit avec l’enzyme, soit avec le complexe enzyme-substrat. Dans l’inhibition non compétitive pure, les valeurs des constantes de dissociation de l’inhibiteur et de l’enzyme et de l’inhibiteur et du complexe enzyme-substrat sont égales (section 8.5.1). La valeur de Vmax est réduite à une nouvelle valeur appelée Vappmax, et l’ordonnée à l’origine sur l’axe vertical est donc augmentée. La nouvelle pente, qui est égale à KM/Vappmax, est plus grande du même facteur. Contrairement à Vmax, KM n’est pas affecté par une inhibition non compétitive pure. La vitesse maximale en présence d’un inhibiteur non compétitif pur, Vimax, est donnée par
Figure 8.38
Inhibition non compétitive illustrée sur un tracé double-réciproque. Un tracé double-réciproque de la cinétique enzymatique en présence () et en l’absence () d’un inhibiteur non compétitif montre que le KM n’est pas modifié et que le Vmax est diminué.