Il y a une chose, à part mon portefeuille et ma carte de voyage, dont je ne me passerais pas dans une grande ville, et c’est mon casque. Mais en fait, je n’écoute pas tant que ça de la musique : Je me contente d’activer la fonction anti-bruit, et j’en reste là.
Aucun son ne joue dans mes oreilles – au lieu de cela, un silence emplit ma tête, comme si les bruits du monde avaient été baissés. Jusqu’à ce que je m’équipe d’un casque antibruit, je n’avais aucune idée à quel point la ville était toujours bruyante, et à quel point j’avais eu faim de silence.
Dans les transports en commun, l’utilisation de la fonction antibruit atténue le vrombissement du moteur et de la circulation. Dans un bureau à aire ouverte, il élimine les bavardages incessants et limite les interruptions. Dans un avion, c’est une révélation. Je ne suis pas le seul à utiliser des écouteurs dernier cri non pas pour la musique, mais pour faire taire le bourdonnement constant de la vie urbaine – cela devient un outil de survie de la vie moderne.
« C’était comme ce moment dans un film où le son se coupe’
Matt Thomas, animateur et concepteur de graphiques de mouvement à Londres, est un converti. Il a découvert qu’il pouvait utiliser la fonction de silencieux seul un jour par accident, lorsque sa musique s’est coupée dans le métro : « J’ai pensé, attendez une minute, il y a cette paix et ce silence vraiment agréables. C’était comme ce moment dans un film où le son se coupe et où tout passe au ralenti. »
Le trafic lourd génère des niveaux de bruit allant jusqu’à 85 décibels (dB), ce que le Health and Safety Executive juge suffisant pour causer des dommages auditifs permanents si nous y sommes exposés pendant plusieurs heures chaque jour. Les rames de métro peuvent dépasser la barre des 100dB lorsqu’elles rugissent dans un virage bruyant.
Thomas met souvent ses écouteurs en mode silencieux lorsqu’il prend les transports en commun (il ne le fait plus dans la rue après avoir failli se faire écraser), mais il préfère la musique pour travailler. Pour Johanna Vogel, économiste à Vienne, en Autriche, c’est l’inverse : elle met de la musique dans le bus mais travaille en silence. Vogel a acheté son casque antibruit en espérant qu’il l’aiderait à se concentrer dans un bureau à aire ouverte. « C’est tellement relaxant », dit-elle. « Au début, je doutais que cela fasse une grande différence, mais maintenant je ne pourrais plus m’en passer. Dans les environnements bruyants, j’ai vraiment besoin d’un moyen de créer du calme pour moi. »
Le bruit n’endommage pas seulement nos oreilles. Des études ont établi des liens entre l’exposition au bruit à long terme et un risque accru de crise cardiaque et d’accident vasculaire cérébral, ainsi qu’une baisse de l’humeur et des difficultés à dormir et à se concentrer. Les effets néfastes sur la santé mentale et physique peuvent commencer à partir de 65dB seulement, un niveau qui semble modéré : un réfrigérateur ronronne régulièrement à 40dB, et un bureau en open space bourdonne à environ 60dB.
Josi Livingston, développeuse dans une startup technologique à Londres, utilise souvent la fonction de silencieux pour bloquer les bavardages au bureau pendant qu’elle code, mais elle apprécie le fait de pouvoir toujours entendre si quelqu’un lui parle. « J’essaie de minimiser les distractions. J’ai besoin de me concentrer, et toute sorte de stimuli supplémentaires m’en empêche », explique-t-elle. « Je pense à cela comme à l’ingénierie de mon environnement pour qu’il soit le plus confortable. »
Les bruits indésirables peuvent provoquer de l’irritation et de la colère s’ils sont ressentis comme une invasion de la vie privée, explique Stephen Stansfeld, professeur de psychiatrie à l’université Queen Mary de Londres, qui se concentre sur le bruit et la santé. « Avoir beaucoup de bruit de fond quand on fait quelque chose est fatiguant. Sans vous en rendre compte, vous faites beaucoup plus d’efforts pour bloquer le bruit. Alors quand vous le fermez, il y a un sentiment de soulagement. »
S’énerver à cause du bruit peut augmenter le niveau de stress et conduire à une mauvaise santé. « Mais il ne fait aucun doute que même si vous n’êtes pas concentré sur le bruit, il peut quand même avoir un effet. Si vous dormez, vous ne vous réveillerez peut-être pas, mais votre corps réagit quand même si vous entendez un bruit fort », explique M. Stansfeld. « Le corps réagit au bruit comme à un facteur de stress. »
Bethany Temple, avocate à Raleigh, en Caroline du Nord, utilise parfois ses écouteurs pour ne pas avoir à entendre la télévision lorsqu’elle est à la maison avec son mari. Temple dit que la fonction silencieuse l’aide à se sentir plus centrée sur elle-même : « Quand on se rend compte de la quantité de bruit ambiant qu’il y a partout : le réfrigérateur fonctionne, le lave-vaisselle, le lave-linge et le climatiseur, les voitures passent dehors. Lorsque cela disparaît, et que vous avez la possibilité d’être silencieux avec vos pensées – une fois que vous réalisez que cela existe dans le monde, vous commencez à en avoir envie. »
Des pilotes de ligne aux citadins
Les casques antibruit ont été créés à l’origine pour les pilotes d’avion afin d’améliorer leur confort lors des longs vols, et les premières versions grand public étaient également destinées aux voyageurs.
La technologie, connue sous le nom d’annulation active du bruit (ANC), fonctionne en utilisant des microphones pour capter les bruits de basse fréquence et les neutraliser avant qu’ils n’atteignent l’oreille. Le casque génère un son dont la phase est inversée de 180 degrés par rapport au bruit indésirable, ce qui fait que les deux sons s’annulent mutuellement.
Le casque ANC réduit le volume du monde d’environ 30 dB, explique Brian Brorsbøl, directeur de la gestion des produits chez Sennheiser Communications – la réduction varie entre 20 dB et 45 dB, car la technologie est plus efficace contre les sons de basse fréquence. « Utiliser la technologie antibruit seule est quelque chose que nous avons entendu certaines personnes faire », dit-il.
Lorsque mon partenaire, qui utilise même la fonction de silencieux lorsqu’il marche dans la rue, m’a dit pour la première fois que ce casque allait changer ma vie, j’étais sceptique. Comment cela pouvait-il être aussi révolutionnaire ? Mais je comprends maintenant.
Ces écouteurs me permettent de créer un espace de respiration dans une ville animée. Ils me permettent de m’entendre penser. Chaque fois que je les mets et que j’enclenche le silence, la sensation est celle d’un soulagement.
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