En 1774, Mesmer produisit une « marée artificielle » chez une patiente, Francisca Österlin, qui souffrait d’hystérie, en lui faisant avaler une préparation contenant du fer, puis en fixant des aimants sur différentes parties de son corps. Elle a déclaré avoir senti des courants d’un mystérieux fluide parcourir son corps et a été soulagée de ses symptômes pendant plusieurs heures. Mesmer ne croyait pas que les aimants avaient obtenu la guérison par eux-mêmes. Il avait l’impression d’avoir contribué au magnétisme animal, qui s’était accumulé dans son travail, pour elle. Il cessa bientôt d’utiliser les aimants dans le cadre de son traitement.
La même année, Mesmer collabora avec Maximilien Hell.
En 1775, Mesmer fut invité à donner son avis devant l’Académie des sciences de Munich sur les exorcismes réalisés par Johann Joseph Gassner (Gaßner), un prêtre et guérisseur qui avait grandi dans le Vorarlberg, en Autriche. Mesmer a déclaré que si Gassner était sincère dans ses croyances, ses guérisons résultaient du fait qu’il possédait un haut degré de magnétisme animal. Cette confrontation entre les idées laïques de Mesmer et les croyances religieuses de Gassner marqua la fin de la carrière de ce dernier ainsi que, selon Henri Ellenberger, l’émergence de la psychiatrie dynamique.
Le scandale qui suivit le succès seulement partiel de Mesmer dans la guérison de la cécité d’une musicienne de 18 ans, Maria Theresia Paradis, le poussa à quitter Vienne en 1777. En février 1778, Mesmer s’installe à Paris, loue un appartement dans un quartier de la ville privilégié par les riches et les puissants, et ouvre un cabinet médical. Il y retrouve Mozart, qui lui rend souvent visite. Paris se divisa bientôt entre ceux qui pensaient qu’il était un charlatan qui avait été forcé de fuir Vienne et ceux qui pensaient qu’il avait fait une grande découverte.
Durant ses premières années à Paris, Mesmer essaya sans succès de faire approuver officiellement ses doctrines par l’Académie royale des sciences ou la Société royale de médecine. Il ne trouva qu’un seul médecin de haut niveau professionnel et social, Charles d’Eslon, pour devenir un disciple. En 1779, avec les encouragements de d’Eslon, Mesmer rédige un livre de 88 pages, Mémoire sur la découverte du magnétisme animal, auquel il joint ses célèbres 27 propositions. Ces propositions exposent sa théorie de l’époque. Certains chercheurs contemporains assimilent le magnétisme animal de Mesmer au Qi (chi) de la médecine traditionnelle chinoise et le mesmérisme aux pratiques médicales du Qigong.
Selon d’Eslon, Mesmer comprenait la santé comme la libre circulation du processus de la vie à travers des milliers de canaux dans notre corps. La maladie était causée par des obstacles à ce flux. Le fait de surmonter ces obstacles et de rétablir le flux produisait des crises, qui restauraient la santé. Lorsque la nature n’y parvenait pas spontanément, le contact avec un conducteur de magnétisme animal était un remède nécessaire et suffisant. Mesmer visait à aider ou à provoquer les efforts de la nature. Pour guérir un aliéné, par exemple, il faut provoquer un accès de folie. L’avantage du magnétisme impliquait d’accélérer ces crises sans danger.
ProcédureEdit
Mesmer traitait les patients à la fois individuellement et en groupe. Avec les individus, il s’asseyait en face de son patient, ses genoux touchant ceux du patient, pressant les pouces du patient dans ses mains, regardant fixement dans les yeux du patient. Mesmer faisait des « passes », déplaçant ses mains des épaules des patients vers le bas le long de leurs bras. Il appuyait ensuite ses doigts sur la région de l’hypocondre du patient (la zone située sous le diaphragme), en maintenant parfois ses mains à cet endroit pendant des heures. De nombreux patients ressentaient des sensations particulières ou avaient des convulsions qui étaient considérées comme des crises et censées provoquer la guérison. Mesmer concluait souvent ses traitements en jouant un peu de musique sur un armonica de verre.
En 1780, Mesmer avait plus de patients qu’il ne pouvait en traiter individuellement et il mit en place un traitement collectif connu sous le nom de « baquet ». Un médecin anglais qui a observé Mesmer a décrit ce traitement comme suit :
Une caricature du « baquet » de Mesmer filmée par Georges Méliès, 1905
Au milieu de la pièce est placé un récipient d’environ un pied et demi de haut qu’on appelle ici un « baquet ». Il est si grand que vingt personnes peuvent facilement s’asseoir autour de lui ; près du bord du couvercle qui le recouvre, il y a des trous percés correspondant au nombre de personnes qui doivent l’entourer ; dans ces trous sont introduites des tiges de fer, pliées à angle droit vers l’extérieur, et de différentes hauteurs, de manière à répondre à la partie du corps sur laquelle elles doivent être appliquées. Outre ces tiges, il y a une corde qui communique entre le baquet et l’un des malades, et de celui-ci est portée à un autre, et ainsi de suite tout autour. Les effets les plus sensibles sont produits à l’approche de Mesmer, qui, dit-on, transporte le fluide par certains mouvements de ses mains ou de ses yeux, sans toucher la personne. J’ai parlé avec plusieurs personnes qui ont été témoins de ces effets, qui ont des convulsions occasionnées et supprimées par un mouvement de la main…
EnquêteModification
La tombe de Mesmer dans le cimetière de Meersburg, en Allemagne.
En 1784, sans que Mesmer ne le demande, le roi Louis XVI nomme quatre membres de la Faculté de médecine comme commissaires pour enquêter sur le magnétisme animal tel que pratiqué par d’Eslon. À la demande de ces commissaires, le roi nomme cinq autres commissaires de l’Académie royale des sciences. Il s’agissait du chimiste Antoine Lavoisier, du médecin Joseph-Ignace Guillotin, de l’astronome Jean Sylvain Bailly et de l’ambassadeur américain Benjamin Franklin.
La commission a mené une série d’expériences visant non pas à déterminer si le traitement de Mesmer fonctionnait, mais s’il avait découvert un nouveau fluide physique. La commission a conclu qu’il n’y avait aucune preuve de l’existence d’un tel fluide. Tout bénéfice produit par le traitement est attribué à « l’imagination ». L’un des commissaires, le botaniste Antoine Laurent de Jussieu, s’oppose aux rapports officiels. Il rédigea une opinion dissidente qui déclarait la théorie de Mesmer crédible et digne d’une enquête plus approfondie.
La commission n’examina pas Mesmer, mais enquêta sur la pratique de d’Eslon.
Mesmer fut poussé à l’exil peu après les enquêtes sur le magnétisme animal bien que son élève influent, Armand-Marie-Jacques de Chastenet, marquis de Puségur (1751-1825), continua à avoir de nombreux adeptes jusqu’à sa mort. Mesmer continua à pratiquer à Frauenfeld, en Suisse, pendant un certain nombre d’années et mourut en 1815 à Meersburg.
Abbé Faria, moine indo-portugais à Paris et contemporain de Mesmer, affirmait que « rien ne vient du magnétiseur ; tout vient du sujet et prend place dans son imagination, c’est-à-dire une autosuggestion générée à partir de l’intérieur de l’esprit. »
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