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Publié le 6 juin 2013

AINS et lésion rénale aiguë

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Mise à jour pour les prescripteurs 34(2):14-15
juin 2013

Messages clés

  • Tous les AINS (y compris les inhibiteurs de la COX-2) ont été associés au développement de lésions rénales aiguës.
  • Les lésions rénales aiguës sont plus susceptibles de survenir chez les patients présentant d’autres facteurs de risque – en particulier des états hypovolémiques.
  • La fonction rénale doit être surveillée chez les patients à risque.
  • En cas de lésion rénale aiguë, l’AINS doit être arrêté.
  • Les AINS doivent être évités chez les patients qui développent ou ont des antécédents de néphrite interstitielle.

Tous les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) ont été associés au développement de lésions rénales aiguës.

Les AINS et les lésions rénales aiguës

Les AINS peuvent provoquer deux formes différentes de lésions rénales aiguës1.

  1. Médiées par l’hémodynamique (par exemple, lésion prérénale et/ou nécrose tubulaire aiguë).
  2. Immune médiée (par exemple, néphrite interstitielle aiguë).

L’atteinte rénale aiguë représente un continuum de lésions rénales allant de modifications cliniquement asymptomatiques de la fonction rénale à l’insuffisance rénale et au décès. L’atteinte rénale aiguë se caractérise par une chute rapide du débit de filtration glomérulaire (DFG) sur quelques heures à quelques jours.

Présentation et diagnostic

Il n’existe pas de signes ou de symptômes spécifiques à l’atteinte rénale aiguë induite par les AINS. Les symptômes de l’atteinte rénale aiguë peuvent être non spécifiques et peuvent inclure un essoufflement, une fatigue, une confusion, des nausées, une diminution du débit urinaire et un gonflement des chevilles/des jambes2.

Les patients présentant une atteinte pré-rénale peuvent présenter des signes de déplétion volumique (par exemple, tachycardie, hypotension absolue ou posturale, pression veineuse jugulaire basse, muqueuses sèches). Les patients atteints de néphrite interstitielle peuvent présenter les caractéristiques d’une hypersensibilité systémique, notamment de la fièvre, des arthralgies et une éruption érythémateuse prurigineuse. Une éosinophilie peut également être présente.

Pathogénie et facteurs de risque

Les AINS inhibent de manière réversible la production de prostaglandines rénales via leur inhibition des COX-1 et COX-2. L’inhibition maximale se produit à l’état d’équilibre des concentrations plasmatiques (généralement 3 à 7 jours).

Les prostaglandines rénales provoquent une dilatation de l’artériole afférente rénale. Ce mécanisme est important pour maintenir le DFG lorsque le débit sanguin rénal est réduit (c’est-à-dire pas chez les personnes jeunes et en bonne santé)1. Par conséquent, l’utilisation des AINS est susceptible d’avoir un effet plus important sur la fonction rénale chez les patients présentant d’autres facteurs de risque (tableau 1).

La manière dont les AINS induisent la néphrite interstitielle aiguë n’est pas claire. Cependant, il a été suggéré que l’inhibition de la cyclo-oxygénase entraîne une conversion préférentielle de l’acide arachidonique en leucotriènes, qui peuvent ensuite activer les cellules T auxiliaires1.

Tableau 1 : Risk factors for NSAID induced acute kidney injury1,2

Risk factor Effect
Increasing age (particularly age >65), chronic hypertension and atherosclerosis Narrowing of renal arterioles which may reduce their capacity for renal afferent dilatation
Pre-existing glomerular disease or renal insufficiency Renal afferent dilatation is likely to be required to maintain GFR
Volume depletion

  • True volume depletion (ie, GI or renal salt and water losses, blood loss, diuretic use)
  • Effective volume depletion (ie, cirrhosis or heart failure)
Lowers afferent glomerular arteriolar pressure and stimulates secretion of angiotensin II
Use of ACE inhibitors or ARBs ACE inhibitors and ARBs préviennent la vasoconstriction des artérioles efférentes, ce qui est également important pour le maintien du DFG
Utilisation de la  » triple panacée  » (IEC ou ARA plus diurétique plus AINS) Le diurétique peut entraîner une déplétion volumique. Voir ci-dessus pour les effets des IEC/ARA.

ACE=Enzyme de conversion de l’angiotensine ; ARA=Bloqueur des récepteurs de l’angiotensine II

Une maladie rénale chronique préexistante et l’augmentation de l’âge sont les facteurs de risque les plus courants de développer une lésion rénale aiguë3.

La  » triple panacée  »

Une récente étude cas-témoins emboîtée a révélé que l’utilisation actuelle d’une trithérapie (inhibiteur de l’ECA/ARA, diurétique et un AINS) était associée à un taux accru de lésions rénales aiguës (rapport de taux de 1,31, IC à 95 % 1,12-1,53) par rapport à une bithérapie (diurétique plus inhibiteur de l’ECA/ARA).

Le risque le plus élevé a été observé dans les 30 premiers jours d’utilisation (Rate Ratio 1,82, IC 95 % 1,35-2,46)4. Cet effet  » triple coup dur  » a été identifié pour la première fois à partir de rapports de cas au début de l’année 2000 et a été souligné dans Prescriber Update en 20025.

Traitement

La fonction rénale se rétablira chez la plupart des patients après l’arrêt du traitement par AINS. Les stéroïdes peuvent favoriser la récupération chez les patients atteints de néphrite interstitielle qui ne s’améliorent pas après l’arrêt du traitement AINS. L’utilisation des AINS devrait être évitée à l’avenir chez ces patients1.

Informations sur la Nouvelle-Zélande

Les AINS sont indiqués pour soulager la douleur et l’inflammation modérées associées à des conditions telles que les troubles rhumatismaux, la chirurgie et/ou la dysménorrhée.

Les données dePHARMAC indiquent que l’ibuprofène est l’AINS le plus fréquemment prescrit en Nouvelle-Zélande. Il est suivi par le diclofénac et le naproxène.

Le Centre de surveillance des effets indésirables (CARM) a reçu 119 notifications d’effets indésirables rénaux associés à l’utilisation des AINS (y compris les inhibiteurs de la COX-2) depuis le 1er janvier 2000 (figure 1).

Figure 1

Figure 1 : Rapports d’effets indésirables rénaux du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2012

Approximativement 70 % des rapports étaient graves, dont quatre décès et 12 considérés comme mettant le pronostic vital en jeu. La majorité des notifications (74%) sont survenues chez des patients âgés de 50 ans et plus.

Le diclofénac était l’AINS le plus souvent mis en cause (53 rapports). Dans deux tiers des rapports, d’autres médicaments ont également été considérés comme suspects, y compris quatre rapports qui ont décrit le « triple coup dur ». Les rapports comprenaient une insuffisance rénale aiguë (33 rapports), une nécrose tubulaire rénale (5) et une néphrite interstitielle (12).

Les professionnels de santé sont encouragés à signaler les effets indésirables suspectés des AINS à la CARM.

  1. Rose BD, Post TW. 2013. AINS : Lésion rénale aiguë (insuffisance rénale aiguë) et syndrome néphrotique. Dans UpToDate, Basow, DS. (ed). Waltham : UpToDate. URL : www.uptodate.com (consulté le 10 mai 2013).
  2. Longo DL, Fauci AS, Kasper DL, et al. (eds). 2012. Principes de médecine interne de Harrison. New York : McGraw-Hill Education. URL:www.accessmedicine.com (consulté le 10 mai 2013).
  3. Centre de défense des meilleures pratiques. 2012. Maladie rénale aiguë sur chronique : prévention, diagnostic, gestion et orientation en soins primaires. Journal des meilleures pratiques 46 : 10-5. URL:www.bpac.org.nz/BPJ/BPJ.aspx(consulté le 10 mai 2013).
  4. Lapi F, Azoulay L, Yin H, et al. 2013. Utilisation concomitante de diurétiques, d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine et d’antagonistes des récepteurs de l’angiotensine avec des anti-inflammatoires non stéroïdiens et risque de lésions rénales aiguës : étude cas-témoins nichée. BMJ 346 : e8525.
  5. Savage R. 2002. A Dangerous Trio. Prescriber Update 23(2) : 20. URL : www.medsafe.govt.nz/profs/PUarticles/DangTrio.htm (consulté le 23 mai 2013).

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